Rêver qu’on dort

Mardi 17 juillet 2012

Cela fait quatre nuits que je rêve de dormir. S’assommer au cognac et tomber sur la table. Cela fait quatre nuits que les anges et les saints se moquent de ma figure. Elle est froissée, les joues s’en vont, les cernes ont pris sur les pommettes.

Je suis à Avignon, donc. Et nous jouons Fille/Mère depuis déjà dix jours.

Je dis que nous jouons mais moi je ne joue pas. Je ne joue jamais, ou quelques fois, à pile ou face. Mais je ne connais pas bien les règles, je ne comprends jamais quand on gagne.

Ici nous avons l’air de gagner, la salle est pleine, les gens pleurent, les gens rient, applaudissent. Quelques retards au démarrage, un manque de jours, mais la pièce a pris son envol. Evelyne, Andréa, Jean-Jacques, je suis fier de ce qu’ils font chaque soir, épaté, chamboulé, et Tioum, et Aron, et Ludo, son équipe, celle du Chêne. Je suis fier, oui, mais je ne dors pas.

Les anges et le saints, je disais.

J’ai vu le spectacle de Christophe, il est magnifique, je l’aime tellement. Allez le voir en tournée, à la Colline, Nouveau Roman. C’est formidable. Il vient nous voir après-demain, et j’ai hâte de lui montrer le mien.

Et j’ai vu François Hollande dimanche, alors, dis donc, il était à un mètre de moi. Notre chargée de communication est toute allée l’embrasser de joie. C’était drôle, sympathique, il était une heure du matin, place des Carmes. Et ce n’était pas l’hystérie, c’était simple, les gens pouvaient réellement l’approcher, normal.

J’écoute ce texte tous les soirs, que j’ai écrit, mis en scène, j’écoute la belle musique de Valentine, je vois les lumières de Stéphane, les beaux costumes de Fred. Les gens me parlent, ça repleure, et moi je voudrais dormir. Je pense à des choses tristes, ou je pense à la mer, se baigner dans l’eau froide, je pense à L’Amour de l’art, je pense au sourire magnifique de cette fille magnifique qui m’a arrêté dans la rue tout à l’heure pour me dire qu’elle avait vu ma pièce et qu’elle l’avait aimée, qu’elle voulait juste me le dire, sans hystérie, normale. On prend ce qui vient, je prends, je prends mais je ne dors pas. Le texte arrive, il tourne en boucle, certains passages, j’essaie de le chasser, le remettre à ce soir. Je pense à Lee Miller, je pense à autre chose, je pense que je n’ai pas dit à Fred que finalement si, c’était mieux de faire un ourlet au pantalon de Jean-Jacques.

Je me relève, je note « ourlet ».

 

Lundi 30 juillet 2012

Paris. Paris ce matin, les nuages, et hier la Chartreuse, un dîner sur les toits en regardant la Lune, un moment suspendu. Ce fut une belle aventure, je n’ai pas beaucoup écrit, juste ces quelques mots, qui précédent. Enfin si, j’ai écrit, mais des choses pas lisibles, immontrables. J’ai eu chaud. J’ai rêvé, sans dormir. Avignon c’est une épreuve, un chemin. Je me souviens avoir dit une chose à Evelyne, il y a quelques jours, en nous rendant au Grand Café. Je lui ai dit : la différence entre la vie et la théâtre, c’est que, dans la vie, l’important ce n’est pas le but, c’est le chemin, alors qu’au théâtre l’important ce n’est pas le chemin, c’est le but. Je ne sais pas si cette phrase est complètement con, c’est possible, les aphorismes me foutent généralement un très très gros bourdon, pourtant, à sa relecture, je la valide, et je change très vite de sujet.

Sans doute devrais-je être un peu plus journalistique, moins abscons, “couvrir” mon festival. Mais je n’en ai pas très envie, je vous l’avoue, c’est trop frais, je m’en remets à des impressions : Creep, des lumières rouges, cette femme qui m’a arrêté aux Carmes pour me demander si j’étais bien moi, puis me dire que, grâce à mon blog, elle avait lu le livre de Kéthévane et qu’il avait changé sa vie, les larmes de Gregori, de Vincent, de Clément, des visages, plein de visages, à la sortie de la pièce, “Qui est ce porc ?”, Véronique et Davina, les artichauts barigoule, la rue Thiers, L’Epicerie puis Les Jardins de la Chartreuse, “Une vraie comédie menée tambour battant”, “Salut”, “Salut”, “L’un n’empêche pas l’autre”, “Tout le temps que ta main dans la mienne”, des larmes, des cris, des rires, du vin crétois, des assiettes arméniennes, des danseurs de claquettes, un petit cognac, un grand cognac, une veine sur un poignet.

Avignon 2012, ça c’est fait.

Allons nous coucher et dormir.

ADDENDUM/ D’autres images arrivent, plein, en vrac. J’en rajouterai peut-être, au fil des jours. Ça va être trop interactif, va falloir être hyper sur le coup.


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1 commentaire

  1. Fais de beaux rêves. En dormant maintenant.

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